Se passe-t-il quelque chose après la mort ? L’Esprit enfin saisi par lui-même ? Où cela se passerait-il ? Cela arriverait-il sur terre où tant il s’est entendu réclamé ? D’y répondre, ne lui serait-ce pas alors un supplice ? D’autant que défait de l’identité à laquelle il s’apparentait, tout serait alors à jamais méconnaissable: L’Esprit s’y perdrait, jeté dans une mauvaise farce, figé derrière un masque que tout le monde s’arracherait. Ou bien l’Esprit renaîtrait-il dans un endroit quelconque, paradis et enfer oubliés, dans un corps quelconque dont l’ombre serait l’esprit éternellement perdu ailleurs. Ne serait-ce pas alors que la mort n’a jamais lieu ?
Catégorie : AIR
— # 19
Les ombres dessinent la lumière, la lumière dessine des ombres, sous le charme des fleurs les flancs de montagnes lavent les souvenirs. Dans les caves les machines à soustraire sont pleines, au ciel les colonies de satellites au pilotage autonome traversent les écrans d’aiguillage d’un robot endormi.

silencio
Ni verticale ni horizontale la musique ricoche le silence, le silence rentre dans la mélodie, en ignore le rythme, corps figé, vacillant, précieux, absent au déplacement de l’air, un pas de retard, sa façon de danser, mélodie parmi les mémoires d’autres mélodies, retour titubant, époux dansant. Sur quoi repose la musique pour attester du passage du temps ?
JARDIN
Un scarabée à l’envers dans la saxifrage, lentement, au lancé des lourds amarres, avantage aux méandres dormants d’une corde délassée.
De fait ses fondations creusent vite l’arbre de sa vie aux branches chétives et flexibles dans les brumes nuageuses pareilles inaperçues, presque tomber dans une nature morte où de juste un rien est exotique.
Fossilisé au terme des jours pas vus passés, il fut vital qu’il se désintoxique. Au jardin facile d’un rien faire quelque chose, juste de l’air brasser la poussière du vieux paradis, honorer la toile d’araignée suspendue au coin où le vent meurt. Allant d’un pas paresseux, le vaste champ des ruines se creuse, en tous lieux traîne un moutonnement de petites solutions.

noyé
Pérégrination en time-lapse, des cannes blanches qui cassent, une odeur de lotus flotte, au ciel sur le caillou-lune marche dans un champ d’argile inondé. Les bateaux sur lesquels mettre les pieds coulent.
Les nuages résonnent de la vie des vagues, d’en haut c’était palpable, un voile se posait sur les yeux. Le corps trop loin pour y tendre respire parmi les grains de sable du pont pour d’autres corps plus lestes. Indisposé, noyé, tout se précipitant, la mer est un abysse, en sacrement ses plus belles visions qu’un cri inaudible rompit.
restes de voyage (b)
À coups de logique, aux forceps, une pensée de délivrance s’ébat, déplie ses ailes, éclatante. Des successions de pics de creux d’ombres, des poussières de nuits à mesure. Couteau sans lame qui patauge à tuer le temps. Le temps passe très vite, non ? Pourquoi n’être pas resté sur place (comment savoir)? Il glisse, chaque jour le regard s’est perdu, le paysage a mangé les mots, n’y avait-il pas déjà assez de mouvement, en manque t-il encore ? En tête la place qu’il y eut une seconde à peine, évanouie, y fût-on une seconde, la seconde n’a de cesse. Garder en tête les frontières tombées au crépuscule, surprendre au détour de l’aube des aveugles endormis, bouche ouverte, la pluie diluvienne, l’eau montante, le grand air, la promesse tenue du grand soir.



