Le zoo est un terrain de jeu rigolard laissé aux nazis, aux religieux déçus, aux rêveurs du dimanche et papa-maman, une expiation discrète au terminus tour du monde, échantillons sauvages collectés en voyage, des souvenirs mausolés. Les enfants s’attendrissent en mâchant les cacahuètes que les singes ont relancées. Bateaux, familles humaines, le soleil est couché et il pleut.
Au rez de chaussée dans le garage on réparait une voiture, un problème de démarrage. Sur le balcon il était loisible d’apprécier la place et la vue, et d’être bien vivant… fort de deux privilèges, de jouir du parc sans y être, et de cette hauteur humer une odeur fauve — bien qu’un trouble, une odeur corrompue, fermentée par celle des graisses et de l’essence, plongeait dans l’embarras, surtout s’il faisait chaud.
Du tour du lac à la virée shoppers et side-cars en basse ville, la troupe avec sens du timing réapparut près de l’étang, au centre du parc, virilement aise de voir immédiatement aux quatre coins se disperser la foule des âmes dolentes, émus et plein des égards accordés « bonjour les gars » aux derniers corps stressés et lents très âgés d’archéologues amateurs concentrant leur dernière énergie à prouver la rumeur de l’existence quelque part dans le parc d’un cimetière d’éléphants.
… l’éléphant solitaire du zoo de Ljubljana, auprès de qui je venais chercher un moment de repos et d’innocence entre deux tournages au camp des réfugiés bosniaques de Roska, et qui avait utilisé la télépathie pour m’informer que la musique sur laquelle il dansait silencieusement était bien le « Tango » de Stravinski (…) » Chris Marker : Slon Tango (1993) –