bien sûr nous avions pris le mauvais chemin, à cause d’un temps d’arrêt, d’une interruption sans autre cause qu’une crainte irraisonnée, et dès le premier pas nous avions dit que plus tard de toute façon nous le rejoindrions, l’autre chemin – et parce qu’aussi celui-là même était plus facile, c’est à dire prendrait plus de temps, en donnerait plus: nous nous appliquerions, donc le temps s’absentait, autour de la porte d’entrée des zones de temps morts, des buvards, des bruits de fenêtres quand le ciel s’abaissait. de temps à autre on ruait en courant au plus loin d’un tunnel, on s’échappait et revenait à temps, avant que les bêtes soient en fuite, et guidé par un âne en amabilité te laissant croire Quichotte, on prenait le chemin des vacances. tant et si bien que l’entrée, du chemin sur lequel nous étions, fut à portée de vue et de même si bien dissimulé, qu’on arrivait plus à dire depuis quand, ni pourquoi les allées se faisaient si étroites
chacune des bifurcations prise lors de péripéties et résolutions noires tombait sur des marécages où surnageaient des gravats, des pièces métalliques, des plastiques, des liquides épais, des fumées moites. de quel coté de quel chemin les marécages venaient-ils ? de plus en plus proches les averses étaient toujours aussi belles. nous nous regroupions près de la porte pour les célébrer, et miracle il arrivait que la rivière déborde. certain auraient aimé faire de la porte un radeau. Nos chiens, eux habituellement si pauvres en discussion, d’oreilles ouvertes bredouilles, avec qui nous échangions des airs de brocanteurs aphasiques, des rêves d’emmurés, soudain devenaient fous, fous de joie, fendus de joie, à notre étonnement renouvelé, nous leur jetions nos chapeaux
parfois encouragés nous nous remettions au passage, levant de terre un mur qui doublait celui-là même en face, celui qui aboutissait ou qui partait de la porte, du passage, pendant que les ronces et le gibier piégé reprenaient, et que nous allions très loin chercher les pierres où les batailles étaient nombreuses. des fragments d’écriture qu’apportait le vent provoquaient des soirées de lecture, nous relisions les religions, c’était toujours ça, riant de n’en savoir pas plus tout en vouant gratitude au passé que l’absence de souvenirs plaçait au firmament, inversant le temps, rêves d’avant le naufrage