« L’homme commence par le principe : « toute grandeur est égale à elle-même et finit par peser le soleil et les planètes ». Il prétend qu’il est fait à l’image de Dieu, mais, là-bas, il boit avec avidité l’urine de l’immortel lama, construit des pyramides éternelles, le Louvre, Versailles et Sans-souci et, considère avec ravissement une cellule d’abeilles et une coquille d’escargot, navigue autour de la terre avec une aiguille, appelle Dieu, ici, l’être le plus actif, et là-bas, l’immobile. Ici le vêtement des anges est un rayon de soleil et au Kamtchatka, une fourrure de glouton. Ce qui m’a toujours beaucoup plu chez l’homme, c’est qu’il puisse construire le Louvre, les pyramides éternelles et Saint-Pierre-de-Rome, tout en considérant avec ravissement une cellule d’abeille ou un escargot dans sa coquille. » / Georg Cristoph Lichtenberg, Aphorisme, p 89, l’arbre double, les presses d’aujourd’hui, Second cahier (1772-1775).

« L’homme. — Toute grandeur est égale à elle-même, dit-il, et il pèse finalement le soleil avec les planètes. Il connaît le temps de l’occultation des planètes les plus éloignées et ignore quand disparaitra le monde qui constitue son corps. Je suis créé à l’image de Dieu dit-il, et là-bas, il boit l’urine de l’immortel lama. Contemple avec émerveillement une cellule d’abeille et peut lui-même construire des églises Saint-Pierre. Jette des grains par le chas d’une aiguille ou l’aimante avec une pierre et trouve son chemin sur la mer. Tantôt, il nomme Dieu ici l’être le plus actif, là l’immobile ; il habille les anges tantôt de soleil, tantôt d’une fourrure de glouton (Kamtchatka), tantôt il adore des souris ou des verres de terre ; ici il croit à un Dieu pour qui mille ans sont comme pour nous le jour qui s’est écoulé hier, et tantôt à aucun Dieu. Se tue lui-même, se divinise lui-même, se châtre lui-même, flambe et se débauche jusqu’à la mort, fait des vœux de chasteté et brule quelqu’un… à cause de Troie. Mange ses semblables, son fumier… (mieux digéré, mieux ordonné) ». / Georg Cristoph Lichtenberg, Aphorisme, p 159-60, l’arbre double, les presses d’aujourd’hui, Troisième cahier (1775-1799).